Les chauves-souris en milieu arboricole sud-est : inventaires et enseignements

Des chauves-souris présentes le long du Rhône, entre Drôme, Vaucluse, Gard et Ardèche ? Jusqu’ici, peu de surprise car c’est un axe de transit de ces mammifères. Quelle abondance d’espèces ? Comment se comportent-elles en milieu arboricole ? Deux études ont été mises en place en 2019 et 2020, par Bayer.

Certifiée Vergers écoresponsables et située à cheval entre les deux rives du Rhône, la ferme de référence de Beauvezet est une exploitation arboricole de plus de 50 hectares avec pommiers, poiriers, pêchers, abricotiers, kiwis... Soucieux de mieux connaître la biodiversité sur sa ferme, l’agriculteur s’interroge sur la présence et le rôle des chauves-souris sur son exploitation.

Trois objectifs à ces études

  1. Inventorier les populations de chauves-souris, et évaluer leur rôle éventuel dans la régulation d’insectes ravageurs
  2. Localiser les sites favorables au développement des chiroptères
  3. Mieux parler biodiversité, rôles et impacts de ces mammifères

En première année, sept points d’écoute ont été installés pendant l’été (période de reproduction) afin de se faire une première idée de la diversité des espèces de chauves-souris. L’année suivante, les écoutes se sont concentrées sur quatre parcelles de vergers durant le transit printanier, estival et automnal. Les écoutes ont lieu avec une méthode innovante « dite passive » de bioacoustique (analyse des cris d’écholocation = sonar).

Un inventaire de chauves-souris riche en milieu arboricole

L’inventaire montre une abondance : 20 espèces différentes ont pu être identifiées, dont certaines avec un statut rare et menacé (2/3 des espèces que compte cette région sud-est). Les chiroptérologues ont pour habitude de classer les chauves-souris en trois catégories, selon leur site de chasse.

Un cortège d’espèces forestières :

  • Dominance d’espèces dites de « lisière » (4 espèces de Pipistrelle qui représentent la majorité des contacts)
  • Présence significative d’espèces dites « glaneuses » (chasseuses, opportunistes)
  • Présence d’espèces dites de « plein ciel » (chasseuses de haut vol)

Les chauves-souris chassent sous les filets de protection arboricole

Fait marquant : l’activité des chiroptères est beaucoup plus importante sous les filets tendus dans le verger. Les chauves-souris sont des chasseuses d’opportunités, la présence et la concentration des proies (carpocapses) sous le filet, entraine une plus forte présence de celles-ci !

A contrario, les parcelles sans filet présentent les activités les plus faibles.

D’autres enseignements ont été tirés de ces études :

  • L’activité est assez homogène quelle que soit la période de transit (printemps, été, automne)
  • Peu de différence d’activités entre les zones de lisière et les zones de vergers.

Les chauves-souris se plaisent en milieu arboricole !

Quel enseignement principal en milieu arboricole ?

« Les chauves-souris exploitent les cultures arboricoles comme les forêts. Elles ne font pas la différence !», voilà ce que retient Edouard Ribatto, le chiroptérologue chargé des écoutes. « Cela corrobore d’autres études de collègues dans des vergers de la Drôme, et c’est la conclusion principale. De plus, les chauves-souris chassent les insectes enfermés sous les filets anti-grêle. » En milieu arboricole, comme en forêt, les chauves-souris trouvent le gîte et le couvert !

Stéphane Bonnissol, ingénieur biodiversité chez Bayer, à l’origine du partenariat pour la mise en place de cette étude avec cet agriculteur, précise : « Nous avons proposé d’aménager des gîtes pour la Pipestrelle de Kuhl. L’idée serait ensuite de pouvoir récupérer du guano et de le faire analyser afin de mieux comprendre le régime alimentaire de ces chauves-souris. Par exemple, il serait intéressant de connaitre la part de chenilles de carpocapse dans leur régime alimentaire au cours de l’année. »

Les chauves-souris sont de précieux insecticides, en effet elles se nourrissent de « plancton aérien » (mouches, moustiques, lépidoptères …). Des auxiliaires à mieux connaître en milieu arboricole, à protéger et à préserver pour combattre les bio-agresseurs (intérêt certain d’une lutte conjointe biologique + chimique).

En conclusion :

  • Mieux les connaître pour mieux les préserver
  • Les chauves-souris considèrent le milieu arboricole comme de la forêt (assurant le gîte + le couvert)
  • Une abondance d’espèces et une diversité dans ce milieu arboricole
  • Appréhender leur rôle de prédation, notamment sur les ravageurs des vergers (carpocapses)