Désherbage céréales : les plantes compagnes peuvent-elles freiner la levée des ray-grass ?

En couvrant le sol, la féverole peut-elle limiter les levées d’adventices dans le blé ? C’est à cette question que doivent répondre une partie des essais installés sur la plateforme Culture Champs Nord dans la Somme. L’objectif est de rechercher le maximum d’efficacité en combinant leviers agronomiques et stratégies de désherbage chimique afin de préserver son rendement et prévenir le développement de graminées résistantes. Les premiers résultats sont très encourageants, avec une nouvelle technique agronomique en perspective !

Plateforme Culture Champs Nord - Mars 2021

La plante compagne utilisée dans le blé est la féverole. Réputée bénéfique pour accroître le taux de matière organique du sol, serait-elle aussi un allié de la culture principale en concurrençant les adventices ? L’hypothèse est à l’étude sur la plateforme Culture Champs Nord de Hangest-Santerre (80). Dans ce cadre, de la féverole a été semée le 31 octobre, tout juste derrière le blé. Détruites à la faveur des gelées de février, ces plantes compagnes n’ont pas nécessité d’intervention chimique spécifique pour être supprimées.

Moins de levées de ray-grass grâce à la levée rapide de la fèverole

40%
de levées de ray-grass en moins dans les essais de blé avec une féverole par rapport au témoin agronomique.

Grâce à une levée rapide et homogène, la féverole a eu un bon effet couvrant ce qui a contrarié la levée des ray-grass. En occupant l’espace, cette plante utile limite l’invasion de graminées nuisibles pour le blé comme le ray-grass présent sur la plateforme. En clair, son atout désherbage : premier germé, premier installé ! « Fin février, nous observons un niveau d’infestation du ray-grass en replis de 40 % dans la bande semée avec de la féverole par rapport aux comptages réalisés dans le témoin (bande sans féverole), témoigne Sarah Fatmi, Ingénieur conseil cultures et environnement. Pour prendre la pleine mesure de ce levier, l’évaluation devra aussi intégrer le rendement et la qualité du blé car les plantes compagnes peuvent apporter d’autres bénéfices agronomiques que ceux liés au désherbage. »

  • Co-bénéfices pour l'eau : un couvert végétal permet de protéger le sol de l'impact de la pluie et permet aussi d'augmenter l'infiltration 

La féverole en tant que plante compagne a aussi la capacité d’accroître l’efficience de la fertilisation azotée du blé. Ces légumineuses améliorent l’apport d’azote via leur décomposition et modifient également la structure du sol par leurs racines.

  • Co-bénéfices environnement : la baisse de la fertilisation azotée contribue à une baisse des émissions de CO2. En moyenne la fertilisation azotée, en grandes cultures représente 80 % des émissions de CO2

En parallèle, l’effet de différents programmes herbicides sur ces plantes compagnes a aussi été observé. « Le passage à l'automne en pré -levée de la culture avec une solution de flufénacet ne semble pas avoir eu d'impact très négatif sur les levées de féveroles; en revanche, le rattrapage en post-levée précoce (1 feuille de la céréale) avec du prosulfocarbe a fait blanchir la plante compagne sans pour autant la détruire », prévient Sarah Fatmi.

Les plantes compagnes s’invitent sur maïs et betteraves

Au vue des résultats obtenus en céréales, cette solution alternative pour gérer la problématique adventice mérite donc d'être poursuivie sur les cultures de printemps.

« Nous allons tester cette technique sur le maïs. Le but est encore de réduire la levée des graminées avec un soin très particulier apporté au risque lié aux plantes compagnes : la concurrence », complète Sarah Fatmi. En effet, dès le début de son cycle, le maïs se révèle très sensible à la compétition. L’insertion d’une plante compagne peut être contre-productif. « Pour cette raison, nous avons choisi d’implanter le couvert après le semis de maïs à 3-4F », souligne Sarah Fatmi.

L’intérêt d’une plante compagne sera aussi testé sur la betterave pour évaluer son impact positif dans la gestion des adventices mais également pour la lutte contre les ravageurs. Dans la situation actuelle, avec la recherche d’alternatives aux traitements de semences de betteraves aux néonicotinoïdes, il est intéressant de se pencher sur tous les leviers possibles permettant de diminuer les dégâts de jaunisse faisant suite à des attaques de pucerons.

Les enseignements clés pour introduire une plante compagne :

  • La levée des féveroles a été rapide et assez homogène.
  • La destruction s’effectue en sortie d’hiver, avant les apports d’engrais. Les gelées peuvent agir favorablement, comme cette année, évitant ainsi un passage d'herbicide.

« Les plantes compagnes peuvent constituer un levier supplémentaire pour limiter la levée des ray-grass et elles peuvent aussi améliorer la fertilisation des sols. Cette meilleure efficience peut se traduire par un gain de rendement et une meilleure teneur en protéines. Ces performances seront à vérifier à la récolte. »

Sarah Fatmi
Ingénieur conseil, cultures et environnement

L’actualité des autres itinéraires techniques innovants des plateformes Culture Champs Centre et Culture Champs Ouest au printemps :

  • Centre : préparation de l’implantation de la culture du maïs, pilotage agronomique avec la plateforme numérique Climate FieldView™,
  • Ouest : réalisation du diagnostic HerbiSecur pour adapter son programme à la parcelle et sécuriser ses applications en sortie d’hiver.