Accroître la performance du désherbage en céréales tout en limitant l’impact environnemental

Pragmatisme, simplicité et innovation ! Tel est le fil conducteur de la plateforme Culture champs Centre installée l’automne dernier à Roches, dans le Loir-et-Cher (41), sur la ferme de Damien Beaujouan. L'objectif en 2021 ? Obtenir une parcelle propre, optimiser le potentiel de rendement de la culture, tout en minimisant l'Indice de Fréquence de Traitement (IFT) et l’impact sur la ressource en eau. En parallèle, la plateforme d'agriculture numérique, Climate Fieldview™ est utilisée par Damien sur son exploitation pour l’accompagner dans ses choix de conduite des cultures. Le point sur les premiers résultats obtenus fin janvier concernant la gestion du vulpin.

« Pour protéger la ressource en eau et diminuer l’utilisation d’herbicides, nous devons nous appuyer sur toutes les technologies comme notre outil de pilotage et de cartographie de la biomasse Climate FieldView, ainsi que sur les méthodes agronomiques. Demain, non seulement on ne traitera plus à l’aveugle tout un champ, mais tout sera mis en œuvre pour diminuer à la fois en amont le stock d’adventices et les charges pour l’agriculteur. »

Jean-Louis Chevrier
Ingénieur conseil, cultures et environnement

Quelle stratégie de désherbage sera la plus rentable et à moindre impact environnemental sur blé et sur orge ?

La comparaison des différents itinéraires agronomiques est lancée sur la plateforme d’essais Culture champs, installée à Roches, dans le Loir-et-Cher (41).

Dans les nouveaux axes travaillés et mis en place en 2021, en complément de la problématique du désherbage des céréales, une expérimentation autour de la protection fongicide. Aujourd’hui, la fusariose est une problématique majeure à prendre en considération dans la conduite du blé, notamment pour répondre aux exigences de qualité des filières vis-à-vis des seuils réglementaires en mycotoxines qui se durcissent. Ainsi, un essai sera mis en place sur blé dur pour étudier la performance de différents fongicides employés à la floraison (dose, positionnement).

 

 

L’innovation technologique et agronomique au service du désherbage

Pour optimiser l’usage des herbicides et leur efficacité face à une importante infestation de vulpins (400 pieds/m2) et sécuriser le rendement, plusieurs pistes sont explorées sur blé et orge pendant cette campagne. Elles sont adaptées en temps réel, selon les conditions climatiques et agronomiques de la parcelle dans le but de se mettre vraiment en conditions « agriculteurs ». Elles jouent sur différents paramètres techniques.

Les leviers agronomiques, dits 'classiques' : 

Labour, faux-semis et décalage de la date de semis ont pour objectif d'abaisser le stock semencier de vulpins. Le premier semis a été réalisé le 12 octobre, le second le 4 novembre. Les programmes herbicides s’insèrent dans chaque item.

  • Co-bénéfices pour l’eau : réalisé perpendiculaire à la pente, le labour va freiner le ruissellement. Le faux-semis avec un outil superficiel, le passage de la herse-étrille cassent la croûte imperméable. L’eau circule mieux dans le sol. La préparation du sol ne doit pas être trop fine.

Le désherbage mécanique, mesure pilier des méthodes complémentaires au désherbage chimique

Le passage de la herse étrille est un des temps forts des essais sur blé et orge à l’automne. « Ces techniques font partie des axes forts d’évolution des pratiques de désherbage conduisant à plus de durabilité », souligne Jean-Louis Chevrier. La herse a été passée au stade trois feuilles du blé, le 26 novembre, dans de très bonnes conditions climatiques. 

A fin janvier : l’efficacité est au rendez-vous, la parcelle est propre.

  • Co-bénéfices pour l’eau : le fait d’ouvrir le sol, avec la herse étrille crée des fentes dans le sol et favorise la circulation de l’eau.

« Sur la plateforme, nous rappelons les techniques qui permettent de diminuer le risque de ruissellement comme le labour, le travail superficiel du sol avec le passage de la herse étrille, l’accroissement de la densité de semis. Un sol avec une structure poreuse, équilibrée en matière organique, permet la circulation de l’eau. Il évite la stagnation des eaux en surface, une des causes du ruissellement. »

Véronique Galvan
Animatrice commerciale

L’accroissement de la densité de semis permet de couvrir le sol et d’absorber plus d’eau

La densité de semis est un levier agronomique intéressant car elle accentue la couverture des sols. Le développement des adventices est contrarié.

  • Co-bénéfices pour l’eau : plus de plantes au m2, c’est plus d’eau absorbée, donc un moindre risque de ruissellement.

Le renforcement de la vitalité des cultures au démarrage

Les semences d’orge et de blé sont enrobées avec une solution riche en oligo-éléments afin de bénéficier d’un effet « booster ». Une bonne implantation des céréales est recherchée grâce à cette technique nouvellement travaillée sur la plateforme. L’objectif est de permettre à la culture de couvrir plus vite les sols, et d’être plus compétitive vis-à-vis des adventices. Ces technologies accompagnent la culture en début de cycle. Le bénéfice se mesure surtout au moment de la récolte.


Résultats fin janvier : à ce stade, on observe un développement de 15 % en plus de la végétation. Il peut être bénéfique à l’efficacité finale. 

Les paramètres du semis pour prévenir la phytotoxicité

Un essai évalue l’incidence de la profondeur de semis sur blé tendre d’hiver et orge d’hiver sur la sélectivité des produits.

Lorsqu’elles sont présentes dans le sol, les molécules peuvent perturber la bonne levée de la culture. Les semences sont placées à 4 cm ou 5 cm, au lieu de 2,5 cm. Les jeunes racines seront alors moins en contact des substances actives. Reste à trouver le juste équilibre, car des pertes à la levée peuvent être aussi observées avec ces semis assez profonds par rapport au standard actuel de 2 centimètres.

L’autre levier alternatif face au risque de phytotoxicité est d’augmenter de 25 % la densité de semis soit de 280 à 350 grains/m2 en conservant la profondeur de semis standard (2 cm). 

Le désherbage à vue, effet « baisse de l’IFT » immédiat travaillé avec la start-up Carbone Bee

La technologie est très prometteuse. Grâce à des modèles basés sur de l’imagerie, les adventices sont détectées et identifiées au niveau des buses par des cameras puis traitées localement par intelligence artificielle. L’herbicide est automatiquement déclenché sur l’adventice reconnue en activant les jets des buses concernées ou par tronçons de buses.

Sur le site, nous cherchons à valider cette technologie sur les céréales à pailles. Elle nous permettrait de récupérer de la cartographie parcellaire. Les cartes pourraient être intégrées dans la plateforme numérique Climate FieldView™, laquelle se positionne comme un outil de pilotage global de la conduite agronomique des cultures. « Grâce à cette technologie, on applique que 30 % de la dose, ce qui apporte un important gain économique au-delà des bénéfices environnementaux », souligne Jean-Louis Chevrier.

Premières observations : en blé et en orge, la technique se révèle moins aboutie qu’en maïs, en raison d’un inter-rang plus serré pour les céréales à paille. Des réglages restent à opérer. Ce printemps, un champ de maïs contigüe à la plateforme sera piloté avec cet outil.

L’emploi d’un outil de mesure pour les parcelles sous contraintes réglementaires

Une parcelle drainée de la ferme est suivie avec Opti’Drain. Cet outil en cours de développement permettra de positionner en toute sécurité les traitements herbicides d’automne avant l’écoulement des drains. La mesure de prédiction s’effectue en lien avec les conditions climatiques de la saison. Il apportera de la souplesse dans l’utilisation des herbicides dont l’usage est réglementé sur sol drainé, comme Mateno®.

La stratégie herbicide vise l’efficacité optimum en lien avec l’agronomie

Différents programmes herbicides à base de Mateno® et de Fosburi® à l’automne, suivis ou non d’un rattrapage en sortie d’hiver avec Atlantis® Pro, sont travaillés sur chaque essai agronomique afin d’évaluer l’efficacité et la rentabilité des stratégies combinatoires. Le taux d’infestation en vulpins se situe à 400 pieds/m2.

Résultats fin janvier : l’efficacité atteint plus de 90 %. « Les traitements de pré et post-levée ont été réalisés dans d’excellentes conditions, indique Véronique Galvan. Dans les essais Mateno®, appliqués 15 jours après le semis, on cherche les vulpins ! ».