ENTRETIEN. En vigne, le LabelPulvé montre la voie pour optimiser les traitements

Le classement des pulvérisateurs selon leur performance est un service attendu par les professionnels. LabelPulvé doit fournir des informations objectives, sous la forme de notes de labellisation A+, A, B, ou C. On fait le point avec Sébastien Codis, ingénieur à l’IFV.

Cet article est extrait du magazine Le Sens de La vigne N° 17 - Octobre 2019 (version pdf consultable en ligne)

Pouvez-vous rappeler l’objectif du LabelPulvé ?

Sébastien Codis : LabelPulvé est un service qui doit fournir des informations objectives, sous la forme de notes de labellisation A+, A, B, ou C. Ces notes portent sur les performances des pulvérisateurs viticoles en matière de qualité d’application des produits pulvérisés. Celle-ci est évaluée à partir de la mesure de la quantité et de la répartition des dépôts de gouttelettes de pulvérisation dans le feuillage de la vigne.

Comment a été effectué ce classement ?

Sébastien Codis : Plus de trente pulvérisateurs dédiés aux vignes larges et douze machines adaptées aux vignes étroites ont été expérimentés. Une base de données sur leurs performances sert de référentiel pour établir la note LabelPulvé. Au total, plus de 500 essais de couples pulvérisateurs/réglages ont été réalisés pour couvrir un maximum de situations. Cette base de données continuera d’être alimentée par les nouvelles mesures des performances des pulvérisateurs effectuées pendant la vie du label.

Les notes permettent d’identifier les techniques de pulvérisation représentant un progrès par rapport au parc de machines en service. La note B correspond au matériel de référence le plus courant. La note C revient à un matériel moins efficace, les notes A+ et A sont données aux pulvérisateurs les plus performants. Ils apportent un niveau de dépôt de pulvérisation équivalent au matériel de référence avec moins de produits, 30 % en moins pour ceux classés A, 50 % pour ceux classés A+. Tous les constructeurs de pulvérisateurs viticoles volontaires recevront les notes de labellisation LabelPulvé.

« Les États généraux de l’alimentation ont donné le nécessaire coup d’accélérateur pour hâter le renouvellement du parc de pulvérisateurs, non sans interrogations sur la responsabilité en cas d’échec du traitement et l’accompagnement. »

Sébastien Codis
de l'Institut Français de la Vigne et du Vin

L’objectif est d’inciter les viticulteurs à investir dans du matériel A et A+. Quels sont leviers existants ?

Sébastien Codis : Oui, il s’agit bien sûr d’orienter le renouvellement du parc vers des machines plus performantes en fournissant aux viticulteurs une information objective sur les performances du pulvérisateur et leur permettre de choisir leur matériel et leurs pratiques en connaissance de cause. Il s’agit d’aider la profession viticole à réduire son impact sur l’environnement en évitant les pertes de produit, et en disposant d’une quantification objective des marges de manœuvre pour l’ajustement des doses de produits appliquées.

Mais, sur le terrain, c’est parfois complexe. Les notes A et A+ sont en général attribuées aux machines difficiles d’emploi, comme les pulvérisateurs avec des panneaux, pas adaptées à toutes les configurations de vignes, ni maniables par tous les salariés. Pour orienter l’investissement, ces pulvérisateurs doivent être éligibles aux aides du plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles (PCAE). Le LabelPulvé a le mérite de proposer un barème simple pour soutenir l’investissement agricole dans un matériel moins polluant.

Qui formera les agriculteurs dans le raisonnement de leur traitement en lien avec la catégorie de pulvérisateur ?

Sébastien Codis : La formation sera assurée par les conseillers agroéquipements et viticoles des Chambres d’agriculture qui sont des relais essentiels sur le terrain. Il faudra également que la distribution qui était restée en retrait sur les questions d’application des produits s’implique davantage. Le site internet LabelPulvé sera mis en ligne par l’IFV et IRSTEA. Les constructeurs possédant des modèles de pulvérisateurs labellisés pourront apposer, sur tous leurs supports de communication, une pastille sur laquelle figurent les notes du modèle. Elle contiendra un QR code. Celui-ci permettra d’accéder aux informations plus détaillées sur le site comme les conditions de réglage des machines pour obtenir le même niveau de performance qu’annoncé dans la note du classement.

Si malgré le respect des recommandations d’utilisation, l’efficacité du traitement n’est pas au rendez-vous, qui gère le risque ?

Sébastien Codis : Plus on est précis, plus on prend des risques. Chacun doit prendre ses responsabilités. L’État d’abord, la filière, du fournisseur de produit jusqu’au consommateur, ensuite. On demande beaucoup aux agriculteurs, ils ne peuvent pas supporter seuls le risque de cette transition écologique.

Quelle est la gouvernance de LabelPulvé ?

Sébastien Codis : La charte de gouvernance de LabelPulvé a été rédigée via un processus de validation B collégiale par le comité de pilotage de LabelPulvé, dans lequel sont représentés à la fois l’administration, la recherche et les professionnels : la DGAL, la DGPE, l’IFV, IRSTEA, l’UIPP, AXEMA, l’APCA, les conseils régionaux, les chambres d’agriculture et le CIVC. La marque LabelPulvé a été déposée par l’IFV.

RAPPEL. Les notes de labellisation du LabelPulvé

  • A+ : Matériels permettant d’obtenir un niveau de dépôt de pulvérisation équivalent au matériel de référence même en utilisant 50 % d’intrants en moins.
  • A : Matériels permettant d’obtenir un niveau de dépôt de pulvérisation équivalent au matériel de référence, même en utilisant 30 % d’intrants en moins
  • B :  Niveau de performance équivalent à celui du matériel de référence
  • C : Niveau de performance inférieur à celui du matériel de référence
À NOTER

Bayer travaille sur l’adaptation de la dose en fonction du volume végétatif et de la pression maladie. Ce projet nommé LWA (Leaf Wall Area) a mis en avant les facteurs à maîtriser pour réduire les doses sans compromettre l’efficacité : les caractéristiques techniques des spécialités utilisées, l’utilisation d’un OAD performant, l’expertise agronomique et le choix d’un matériel de pulvérisation adapté. La réduction de dose est un sujet complexe et la mauvaise interprétation du classement Label Pulvé pourrait laisser croire que la réduction de dose pourrait se systématiser quel que soit le profil du produit, la pression maladie ou la pousse de la vigne.

Bayer se doit d’alerter sur le danger de systématiser les réductions de doses uniquement sur le critère matériel quels que soient la pression maladie, la cinétique de pousse de la vigne et le produit utilisé.