Des pistes pour réduire les ZNT en viticulture

Les essais dérive menés par l'IFV et ses partenaires dans le cadre de la Cietap ont permis l'inscription en décembre dernier au bulletin officiel de premiers moyens réducteurs de dérive pour les vignes étroites, la rampe pneumatique face par face CG et AB Most CS de Berthoud. D'autres matériels présentent des résultats très prometteurs.

« La réglementation sur les ZNT en vigueur depuis l'arrêté du 4 mai 2017 vise à diminuer les risques de pollutions diffuses en éloignant l'application des produits phytosanitaires des points d'eau à risque. »

Sébastien Codis
de l'Institut Français de la Vigne et du Vin

Les applicateurs de produits phytosanitaires sont tenus de respecter au voisinage des points d'eau une ZNT, mention réglementaire qui accompagne l'AMM (autorisation de mise sur le marché) et qui est donc spécifique au produit et à l'usage.

Les largeurs de ZNT ne peuvent prendre que 4 valeurs : 5, 20, 50 ou 100 mètres et plus. En l'absence de mention sur l'étiquette du produit, la ZNT est par défaut de 5 mètres (lire comprendre les ZNT).

Trois conditions pour réduire les ZNT

Néanmoins, le législateur a prévu la possibilité de réduire les ZNT de 20 à 5 mètres ou de 50 à 5 mètres sous réserve de respecter simultanément 3 conditions :

  • Présence d’une bande enherbée d’au moins 5 mètres de large en bordure du point d’eau avec en son sein un dispositif végétalisé ou arbustif d’une hauteur équivalente à celle de la culture en place
  • Enregistrement de tous les traitements effectués sur la parcelle (date, nom commercial de la spécialité, AMM, dose),
  • Mise en oeuvre de moyens permettant de diminuer le risque pour les milieux aquatiques

Ces moyens figurent sur une liste publiée au Bulletin Officiel du ministère de l’agriculture et de la pêche. Pour figurer sur cette liste, le moyen doit permettre de diviser au moins par trois la dérive par rapport aux conditions normales d’application des produits.

« Si en grandes cultures, il existe un certain nombre de moyens reconnus permettant de diminuer le risque pour les milieux aquatiques, en revanche, en viticulture et en arboriculture, hormis quelques équipements pour l’application des herbicides, un seul moyen a été homologué à ce jour pour les applications de couverture générale. »

Sébastien Codis
de l'Institut Français de la Vigne et du Vin

Repère : 3 voies de transfert potentiel vers les eaux de surfaces

  • Le ruissellement Il dépend de la topographie de la parcelle, de la nature du sol et du couvert végétal (intérêt des haies végétalisées). La mise en place de bandes enherbées entre la parcelle et les points d’eau limite l’entraînement des eaux par ruissellement.

  • Le drainage En fonction de la nature du sol et de la pente, un couvert végétal peut également être bénéfique.

  • La dérive Ce risque dépend du type de matériel et bien sûr de son réglage mais aussi du mode de conduite et du stade végétatif de la culture.

Etudes en cours sur les moyens de réduction de la dérive

Les travaux sur la réduction de la dérive ont été initiés en 2007 au travers d’un groupe interfilière constitué spécifiquement au sein de la Cietap et coordonné par le Cemagref en collaboration avec des partenaires souhaitant s’impliquer dans cette problématique (Bayer, Berthoud, CIVC).

L’homologation des moyens réducteurs de dérive s’appuie au niveau européen sur la méthodologie définie dans la norme ISO22866 et développée initialement pour les grandes cultures.

L’arrêté du 04/05/2017 définit les exigences pour l’inscription des moyens permettant de réduire les ZNT : ils doivent permettre, en utilisant le cadre de la méthode ISO, de réduire la dérive d’un facteur au moins égal à 3 par rapport à un appareil de référence représentant les conditions normales d’application des produits. En viticulture, et plus particulièrement en vignes étroites, la « voûte 10 sorties » traitant 8 rangs en uniface par passage a été choisie comme référence.

« L’avancée de ces travaux se heurte malheureusement à la lourdeur du protocole à laquelle s’ajoutent des contraintes de réalisation très fortes en terme de conditions météorologiques (vitesse, direction du vent) pour la validation des résultats mais aussi de choix des parcelles d’essais. »

Sébastien Codis
de l'Institut Français de la Vigne et du Vin

Néanmoins, sur les 3 années d’essais, plus de 16000 boîtes de Pétri ont été disséminées dans les vignes pour piéger les embruns de pulvérisation, puis récupérées et analysées.

Jusqu’à présent, 9 appareils de pulvérisation ont pu être testés :

  • 3 pulvérisateurs pneumatiques : V10S (voûte 10 sorties, appareil de référence dérive), ABMOST (Berthoud traitement face par face), CG Berthoud (appareil inscrit en décembre dernier)
  • 3 pulvérisateurs à jets portés (GRV Production)
  • 3 pulvérisateurs à jets projetés (2 pendillards et un appareil GRV Production) 

Des matériels inscrits et des pistes prometteuses

Les résultats obtenus ont conduit à l’inscription en décembre 2010 des équipements pneumatiques Berthoud CG et AB Most CS comme moyen réducteur de ZNT. Un autre matériel pourrait rapidement faire l’objet d’une demande : les buses TVI sur pendillard avec la technologie « jet projeté ».

D’autres matériels et/ou configurations présentent des résultats encourageants (utilisation de buses à injection d’air sur des appareils face par face à jet porté) mais ils ne disposent pas de suffisamment de répétitions pour une validation.

Par ailleurs, il semblerait que les buses conventionnelles (à fente ou à turbulence) sur les matériels à jet porté, qu’ils soient ou non en face par face, ne permettront pas de réduire la dérive d’un facteur 3, en raison d’une trop forte dérive observée à 5 et 10 m.

« L’objectif est d’identifier des matériels qui permettront de conserver une bonne qualité de pulvérisation tout en diminuant la dérive. »

Sébastien Codis
de l'Institut Français de la Vigne et du Vin